Démarche artistique : l’eau, le corps et la mémoire sensible
Eugénie Didier a développé une série dédiée au corps dans l’eau, autour de laquelle s’articule une réflexion sur la jeunesse, la métamorphose et la manière dont les corps dialoguent avec leur environnement. Dans l’histoire de l’art, l’eau accompagne souvent les représentations des corps jeunes : des naïades antiques aux baigneuses de Renoir ou Cézanne, elle incarne la fraîcheur, la vitalité et l’harmonie entre la nature et l’humain. Mais elle symbolise aussi le passage, ce mouvement continu qui rappelle la fugacité de l’âge, des sensations, de la mémoire.
Dans ses toiles, l’eau devient une matière expressive. Elle flotte, reflète, enveloppe, suggère. Elle dissout les contours ou, au contraire, accentue les gestes. Le corps y apparaît en transformation, en transition, entre la solidité du sol et la fluidité du mouvement. Cette dualité – entre permanence et glissement – confère à ses œuvres une dimension poétique profondément contemporaine.
La peinture d’Eugénie Didier cherche à révéler “ce qui est au bord des choses” : les silences partagés, les gestes suspendus, les fragments d’histoires qui ne se montrent pas entièrement mais qui s’inscrivent dans les détails. Les textures, les cadrages rapprochés, les formats souvent imposants créent une proximité avec l’image, invitant le spectateur à entrer dans la scène plutôt qu’à la contempler de loin.
Ce hors-champ, toujours présent, devient un espace d’imagination. Il installe un dialogue intime entre l’œuvre et celui qui la regarde. En révélant la beauté des moments fugaces, Eugénie Didier propose une peinture qui n’illustre pas seulement la réalité, mais la façon dont nous la percevons, la retenons, et parfois la réinventons. Sa démarche est une exploration de la mémoire sensible, du temps qui s’écoule, et de la capacité de l’art à saisir l’invisible.